lundi 4 juillet 2011

Lettre ouverte aux amateurs de fables orientales

Au-delà de l’entreprise de réhabilitation d’idéologies criminelles, le négationnisme, par la posture philosophique dont il se pare, constitue une tentative de destruction de ce que la pensée occidentale a apporté de plus novateur : la distinction entre réalité sensible et vérité intelligible. Il constitue donc à proprement parler une entreprise de désoccidentalisation du monde.

Une discussion courtoise mais franche m’a récemment mis aux prises avec le sympathique rédacteur en chef du Taurillon. Ce webzine fédéraliste a eu l’idée contestable de consacrer à la Turquie la semaine de commémoration du Génocide des Arméniens avec, bien entendu, des articles favorables à l’adhésion de ce pays à l’Union européenne. Très loyalement d’ailleurs, il m’a été proposé de rédiger un article en sens contraire, ce que j’ai fait. Cet article a également été publié par le Taurillon, quoique tardivement, mais il n’aborde pas un point pourtant crucial sur lequel j’entends ici revenir.

La cause de mon navrement, et de la présente réflexion, réside dans les idées développées par un article de M. Joseph Richard intitulé « Génocide arménien : histoire et politique ne font pas bon ménage ». Les lecteurs intéressés pourront s’y reporter mais, pour la résumer en quelques mots, l’argumentation de l’auteur consiste à affirmer que la « liberté d’opinion » doit être totale – en Europe comme en Turquie – et que l’Union européenne ne devrait se battre que pour permettre aux citoyens turcs d’avoir l’opinion qu’ils souhaitent sur cette question sans encourir les poursuites judiciaires de l’article 301 actuellement en vigueur dans ce pays ; et de mettre implicitement en parallèle, cette disposition du code pénal turc et les projets de pénalisation du négationnisme en France.